DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL / Il faut compter avec les Nippes
Les Nippes, en tant que nouveau département, sont assez mal lotis. On en parle
comme s’il s’agissait d’un enfer. Les infrastructures de base font cruellement
défaut. Pas de routes asphaltées. Les nouvelles communes manquent de tout et
les anciennes périclitent. Mais, il suffit d’ouvrir l’œil pour remarquer les
grandes potentialités du département.
Samedi 9 août 2008. Il est sept heures du matin. La circulation automobile et
piétonne est intense sur le tronçon de route Petite Rivière / Anse-à-Veau. Ici,
comme partout ailleurs dans les provinces du pays, la population se lève très
tôt et vaque dès l’aube à ses activités. Des groupes joyeux de paysans se
rendent dans les champs, armés de vieilles machettes ou de longs coutelas. De
longues files de femmes portant des cuvettes remplies de denrées hâtent le pas.
Des camions vides se dirigent vers l’ouest tandis que d’autres surchargés de
produits agricoles prennent la direction de Miragoâne. Partout, on bouge dans
tous les sens. Il faut plus que l’état déplorable des routes pour décourager
les camionneurs.
D’immenses potentialités agricoles
Nous sommes donc en plein cœur du nouveau département des Nippes. Le
rendez-vous du jour : le marché d’O Rouck, localité communément appelée
Karouck, située à mi-chemin entre PetiteRivière de Nippes et Anse-à-Veau. Ce
marché explique à lui seul l’intense va-et-vient décrit plus haut. Depuis la
nuit des temps, des revendeurs des grands marchés publics de la zone
métropolitaine de Port-au-Prince viennent s’y ravitailler chaque fin de semaine
en vivres alimentaires et en denrées de toutes sortes. Le tout, à bon marché.
Les prix font rêver : 25 gourdes la marmite de citron, 30 gourdes la douzaine
d’avocats verts, et 50 gourdes la marmite de maïs moulu. On comprend alors
aisément l’importance accordée à ce marché essentiellement agricole. Les gros
et savoureux avocats violets, le cachiman « pòm kanèl » et le citron sont des
particularités des Nippes, en plus des autres denrées agricoles que l’on
retrouve partout dans le pays. Aussi, n’est-il nullement étonnant, pour
l’habitué de la zone, de trouver à profusion à O Rouck : le melon, la canne à
sucre et le « cachiman » de PetiteRivière, le café de Plaisance du Sud, le riz,
les avocats et la « quenêpe » de Anse-à-Veau et de Fonds des Nègres, le citron
et la banane de Petit-Trou, les cultures maraîchères de Paillant. « Pour rien
au monde nous ne raterons le rendezvous d’O Rouck. Pour nous, ce marché est
tout aussi important que celui de Fonds des Nègres ou de Ducis. Nous y achetons
en grande quantité et à bon prix des denrées agricoles que nous revendons à
Port-au-Prince », explique une marchande.
Pêche très active
Contrairement aux idées généralement véhiculées, les potentialités des Nippes
ne se réduisent pas au port de Miragoâne. Ce département, au point de vue de la
production agricole, possède des atouts intéressants à valoriser. La vaste
plaine de Baconnois, irriguable, qui s’étend entre Anse-à-Veau et Petit-Trou,
est dans l’attente d’une exploitation rationnelle et intensive. Les centres de
recherche agricole de Madian et de Salagnac, uniques dans leur genre à
l’échelle nationale, doivent être réactivés. Par ailleurs, en plus de la
production agricole, la pêche constitue l’autre richesse des Nippes. Des
flottilles de pêcheurs sont très actives au niveau de toutes les communes
côtières, particulièrement à Baradères et à PetiteRivière. À Anse-à-Veau, les
pêcheurs sont spécialisés dans la chasse de la tortue de mer géante appelée «
Karèt » dont la carapace est très recherchée. « Nous pouvons vendre jusqu’à
cinq mille gourdes une carapace de Karèt. Les artisans l’utilisent pour
réaliser des bijoux, des ustensiles et autres œuvres d’art », informe Jarbouin
Poulard.
Produits transformés
Au niveau de ce département, ils sont légion les groupes mixtes et les
organisations de femmes spécialisés dans la transformation des produits
agricoles. Le plus célèbre est le groupe « Bon ZenZen », lequel commercialise
une boisson énergisante du même nom, composée de miel, de l’hydromel et du
vinaigre de qualité supérieure. Les autres groupes transforment généralement le
riz, le maïs, l’arachide, la pelure de « chadèque ». Le vin de riz de Anse-àVeau
est célèbre. Nous nous proposons de réaliser ultérieurement un reportage sur
ces produits qui souffrent cruellement d’un manque de promotion. Le sirop de
canne et le clairin en provenance d’Arnaud sont prisés par les connaisseurs.
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